« Avant d’exécuter sa criminelle pensée, Judas s’était assis à la table du Sauveur, et il avait goûté de cette Cène mystique ». Ce témoignage de Jean Chrysostome (De proditione Iudae homiliae II, PG 49, 389) pose la problématique de la participation de Judas à la Communion. Les opinions des Pères sur la question sont partagées : les uns (Chrysostome, Augustin et l’iconographie paléochrétienne) se prononçaient affirmativement ; les autres (Ephrem le Syrien, Hilaire de Poitiers et les Constitutions Apostoliques) négativement. Cyrille d’Alexandrie se prononçait parfois pour, parfois, contre. Origène, quant à lui, écrit que Judas a pris la bouchée, « mais ne l’a peut-être pas mangée ». Allant dans la même direction, Nicolas d’Andida note : « lorsque tous les disciples [à la Cène] ont reçu le Pain Divin de la main du Christ […], seul Judas, en le prenant, le cacha et le montrant aux Juifs, exposa le Mystère à dérision » (Commentatio Liturgica, PG 140, 449, n. 25).
Mais que signifie la Communion pour le disciple qui est parti aussitôt après l’institution de l’Eucharistie ? « Même en participant aux mystères, il [Judas] resta ce qu’il était. En profitant du repas effrayant, il n’était pas changé » (Chrysostome, In Matthaeum Hom. 82, PG 58, 737). Cette vision chrysostomienne inspirera Théophane de Nicée à parler d’une participation physique, différente de la participation spirituelle à l’Eucharistie : « Judas a touché uniquement le corps du Sauveur, et cela d’une manière sensible, il n'a pas participé à la grâce qui était en lui, car il est resté indigne » (Sur la lumière thaborique, éd. Sotiropoulous 1990, p. 97).
Reste à savoir si la Cène était déjà la célébration de l’Eucharistie. Si d’après Chrysostome « le repas ici présent [célébration eucharistique] est le même que celui-là [la Cène] et il n’a rien de moins » (ibid., 744) comment pourrait-on justifier la présence de Judas à la Communion ?
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